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Numéro 86
la maison écologique

N°86 - Avril-Mai 2015

Dossier : 10 expériences de construction en bois local A la loupe : Colombage alsacien revisité Regard sur: Solaire, gérer la fin de vie Enquête énergie : Les éoliennes Piggott à autoconstruire Outillage: Les bons outils des maçons écologiques Faites-le vous même: Construire son capteur solaire à air ... Version numérique : Retrouvez vos numéros enrichis de bonus, en ligne ou sur l'application. Téléchargez ou imprimez-les si besoin.

Edito

La nature dans le code civil Que vaut la vie des oiseaux libres comme l'air ? Quel est le coût de la disparition des organismes aquatiques, des mammifères sauvages, des zones humides, des abeilles ? Mais que vaut donc la Nature ? Vaste question, éminemment politique et un rien philosophique. Mais une question qui va bientôt devoir trouver des réponses car les atteintes à l'environnement sont de plus en plus nombreuses : 67?211 infractions relevées en 2014 par l'Observatoire de la délinquance en France ! Ces délits sont en outre difficiles à juger, notre code civil prenant surtout en considération la seule atteinte à la propriété privée. Si le chasseur qui a abattu l'ourse Cannelle, dernière représentante des ours pyrénéens, n'a écopé que de 10?000 € d'amende, les juges ont enfin su créer une jurisprudence forte lors du procès du pétrolier Erika. Pour avoir dispersé 10?000 tonnes de fioul dans l'océan, souillant ainsi 400 km de littoral et provoquant la disparition de 200?000 oiseaux, Total a dû s'acquitter de 200 millions d'euros au titre du « préjudice écologique » – une première en France. Une somme à verser à l'État, aux collectivités territoriales et aux associations de protection de la nature. Cette jurisprudence devrait aboutir prochainement à l'introduction dans le code civil de cette notion de préjudice écologique. Le texte censé passer avant l'été devant l'Assemblée nationale privilégie, et l'on peut s'en réjouir, la réparation en nature plutôt que l'indemnisation financière. Si c'est impossible, le texte prévoit alors que le pollueur paie jusqu'à 10 % maximum de son chiffre d'affaires mondial. En 2013, celui de Total était de 189,5 milliards d'euros... Une bonne nouvelle pour les protecteurs de l'environnement ? A priori oui, excellente même. Seulement... Le diable se faufilant toujours dans les détails, il a planté son trident dans l'un des articles adoptés par le Sénat en première lecture : « Lorsque la réparation en nature du dommage n'est pas possible, la réparation se traduit par une compensation financière versée à l'État ou à un organisme désigné par lui et affectée à la protection de l'environnement. » L'État serait donc l'unique bénéficiaire, et ainsi le seul à pouvoir réclamer la réparation du préjudice ! Le contre-pouvoir se situant plutôt du côté de la société civile, il y a tout de même de quoi s'interroger. L'État français n'est-il pas actuellement le promoteur de l'énergie nucléaire, de l'agriculture productiviste et encore hésitant sur les gaz de schiste ? Enfin, ne subit-il pas l'influence des multinationales ? Sous couvert d'un texte capital pour la reconnaissance de l'environnement, le gouvernement ne va-t-il pas faire marche arrière vis-à-vis de la jurisprudence Erika ? Les associations vont devoir rester vigilantes. Elles peuvent encore agir pour faire évoluer le texte et c'est bien pour cela qu'il faut les soutenir*. Julie Barbeillon * Vous cherchez des associations à aider ? Regardez notamment du côté de France Nature Environnement (elle fédère 3?000 structures en France), des Robins des Bois, de la LPO, d'Agir pour l'Environnement...